Dans le dernier billet j’évoquais Giono bloqué dans son désir d’éviter la guerre par l’absence de moyens pour y parvenir. Il exposait alors une solution complètement inefficace. Et c’est exactement la situation de la plupart d’entre nous. Notre impuissance, c’est à dire le grand écart entre notre prise de conscience d’un dérèglement, disons sociétal, et le moyen de le corriger est devenue totale. Du coup notre impatience grandit au même rythme et conduit à des défilés sans fin, des pétitions, des grèves ou des occupations qui ont autant d’effet que de vider la mer à la petite cuillère.
En plus nous sommes au courant, tout le monde, s’il le souhaite, est au courant. On sait les conditions de détention, les expulsions, le mépris du droit, les écarts de salaires, on sait la corruption, la manipulation des informations, les avocats achetés, la France-Afrique, les cadeaux aux banques, Les exactions, assassinats, injustices, empoisonnements, dénis, passages en force se déroulent sous nos yeux. On sait, on sait, on sait tout. On sait tout ça et c’est de plus en plus.
On est en train de « découvrir » que le « chlordécone » a empoisonné sciemment les Antilles à cause de multiples délais avant l’interdiction, et on continue avec le glyphosate. Alors la question du « comment faire » pour arrêter cette catastrophe est obsédante. C’est le syndrome Giono.
Comment changer ça ?
Il est clair que tous ces dérèglements, injustices, guerres, pollutions, dictatures et autres sont uniquement et totalement politiques. Il n’y a pas de crises économiques, de conflits sociaux, de fanatisme religieux, de guerres saintes, ni de guerres justes. Il n’y a que le mauvais fonctionnement politique des sociétés avec ses conséquences. La vie en société est politique par nature puisqu’elle consiste à savoir comment la faire. Et donc tout ce qui concerne le changement de ou dans la société est politique. La problématique est donc d’agir sur la politique et là il y a une panoplie assez étendue de solutions. Cependant toutes ces conceptions ont un point commun c’est « la prise de pouvoir ». Pour changer de politique, il faut changer de pouvoir. Ou si vous préférez prendre le pouvoir pour changer le pouvoir.
Le seul défaut c’est que prendre le pouvoir ça ne marche pas. Ca n’a jamais marché. Le constat, sans appel, c’est que l’exercice du pouvoir est plus fort que la bonne volonté et que c’est lui qui impose sa logique. Or la logique du pouvoir, c’est de s’en servir et c’est un piège mortel.
Alors, pour sortir du syndrome Giono, je ne préconise pas du tout de prendre le pouvoir, surtout pas de la manière dite démocratique. Pour moi ce ne sont pas les institutions ou le pouvoir qu’il faut changer, ce sont les hommes, les hommes au pouvoir et ceux qui le leur donnent. C’est pour ça qu’au contraire de la prise de pouvoir je propose la privation de pouvoir. La privation de pouvoir par les urnes, c’est-à-dire en les laissant vides.
Michel Costadau
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