La prise de conscience, c’est comme une cristallisation. Tous les éléments sont là en ordre dispersé et d’un seul coup ça prend. Et tout le monde dit « bon dieu mais c’est bien sûr ». On appelle ça abusivement un changement, mais, en fait, les changements c’est ce qui a eu lieu avant et dont personne ne se rendait vraiment compte.
Parce que tous les changements ne se font pas à la même vitesse et certains sont si lents qu’on a du mal à les percevoir. De manière évidente, c’est le cas pour le climat où l’on parle surtout de moyenne car la variation journalière est microscopique, à supposer qu’il y en ait une. Bien sûr certains changements sont plus faciles à observer, comme le prix du fuel ou une nouvelle naissance.
Et hélas les changements les plus doux sont les plus pernicieux.
Alors c’est comme ça, lentement, tout doucement, que la France est devenue injuste. Injuste et inégalitaire. Le mécanisme de base est le suivant : les gouvernants prennent une mesure apparemment destinée à tout le monde, mais qui s’avère petit à petit ne profiter qu’à une partie de la population et c’est un peu trop souvent la même. Voyons ça.
Le tgv est une belle invention pour se déplacer vite sans polluer directement. Et c’est rentable. Le problème c’est que leurs rames occupent maintenant beaucoup de quais dans les gares de départ, au détriment des trains dits de banlieue qui, du coup, sont moins nombreux, moins fiables. Et c’est donc de plus en plus la galère… sauf pour ceux qui ne prennent que les rapides. C’est tgv contre banlieue.
Dans le même registre il y a, aussi, la suppression de certains arrêts ou même de la ligne. Pas rentable. Mais là l’injustice s’accélère. Pas de train veut dire voiture, frais, embouteillage. Je ne vous parle pas du bus de remplacement du train qui arrive plein et ne peut prendre personne. Et là dessus arrive la taxe gas-oil qui tombe sur ceux qui n’ont pas le choix. Parce que, même si c’est payant, les métros, RER, tram des villes ne connaissent pas la taxe gas-oil. Et cerise sur le gâteau, ces décisions sont prises par des fonctionnaires qui habitent en ville et vont à pied au … je n’ose pas dire boulot, disons au ministère.
De même, le baccalauréat pour tous paraît une bonne nouvelle. Seulement le manque de moyens humains et matériels, décidé sciemment par les politiques, a obligé l’État a baisser énormément le niveau de façon à permettre à toute la tranche d’âge d’obtenir le fameux sésame. Est alors réapparu, à supposer qu’il ait jamais disparu, le poids des classes sociales. A tel point qu’aujourd’hui la majorité de la tranche d’âge sort sans la moindre qualification. Et les classes aisées raflent toutes les formations et tout le travail.
Et beaucoup plus grave encore, il y a une prise de conscience qui n’a pas encore eu lieu mais qui s’annonce, c’est la notion de député. Il y a longtemps, les députés étaient élus pour leur convictions, leur courage, leur pugnacité. Ils étaient connus des électeurs pour leur combativité et la force de leurs idées. Cela a bien changé, car voila qu’au dernières législatives beaucoup d’électeurs ont voté pour des gens qu’ils ne connaissaient même pas. On est donc passé des députés porteurs d’idées aux députés larbins de gourous. Et ces valets ont des privilèges qui choquent ceux qu’ils sont censés représenter. Or les députés sont la seule pratique qui nous relie encore un peu aux lambeaux de la démocratie.
Clairement, la prise de conscience actuelle c’est que la France est de plus en plus injuste. En général ça demande une révolution.
Michel Costadau
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