Je l’ai déjà dit, je me suis vraiment étonné de l’absence de réaction des citoyens aux privations de liberté qui ont été instaurées pendant deux mois. Je m’attendais à une sourde rumeur de désapprobation pour ces attestations, voire un appel à les contester ouvertement, c’est-à-dire dans la rue, dans l’espace public. Visiblement rien de cela ne s’est passé à tel point que le pouvoir a pu affirmer que ces dérogations étaient bien acceptées. Ce n’était évidement pas le cas parce qu’en fait elles étaient subies, supportées comme un faux papier mais sans la moindre adhésion.
Je me suis quand même interrogé, et du coup, j’ai regardé comment chacun ressentait et vivait cette atteinte et j’ai découvert que nos concitoyens avaient pratiqué une forme de résistance qui est l’évitement. L’évitement, en gros, c’est le contraire de l’affrontement. L’évitement c’est la forme de défense des enfants, du genre pas vu pas pris. C’est basé sur la peur de la répression mais ça permet d’atteindre un objectif en essayant de ne pas se faire attraper. C’est quand même un peu de la résistance parce que l’objectif est atteint en transgressant une loi, mais sans que ça se sache.
Cette attitude est déjà pratiquée depuis longtemps par exemple par rapport aux radars, à l’économie parallèle, au fisc, quand le seul but est de ne pas se faire prendre.
C’est comme au rugby, l’évitement consiste à éviter de se trouver, délibérément, dans une situation répréhensible. Ce n’est pas une attitude très valeureuse et c’est pourquoi les jeunes pratiquent plutôt l’affrontement car non seulement c’est l’âge où l’on n’a pas peur de la mort, mais aussi celui où l’on a envie d’en découdre physiquement.
Et donc nos concitoyens ont inventé des parcours secondaires pour atteindre la campagne en évitant les barrages policiers. Ils ont pris plusieurs attestations successives d’une heure pour se trouver dans le bon créneau en cas de contrôle. Ils ont prétexté une démarche professionnelle pour aller voir leur copine. Ils ont pris le crayon, la gomme ou le blanco pour régulariser leur sortie. Comme je l’ai dit, ce n’est pas très glorieux mais il faut dire que les exemples d’en haut comme d’habitude encourageaient plutôt le non respect des mesures.
Cela dit, hélas, la stratégie de l’évitement est la seule possible dans notre système policier. Le pouvoir a détruit toutes velléités de manifestation pacifique, d’expression populaire dans la rue, de combats de défense dans les entreprises. Tout est ratatiné par les robocops munis de tous les droits et défendus continuellement par l’Etat lui-même. Lui qui devrait nous défendre, il défend ceux qui nous gazent et nous matraquent.
La question est maintenant : est-ce que cela va changer ?
Dire que l’on n’en sait absolument rien est un peu facile parce qu’il se passe quand même des choses que l’on peut voir. Par exemple, tous les dirigeants politiques actuels ne pensent qu’à leur réélection. Trump se rue sur la répression pour endosser les habits de l’ordre et de la protection des biens, alors qu’il n’a fait que semer la discorde depuis 4 ans. Poutine cherche à trafiquer la Constitution pour être à nouveau candidat, alors qu’il a fait du respect des institutions sa carte de visite. Notre pauvre clown a ressorti son arsenal de phrases ronflantes et de promesses alors qu’il n’a tenu aucune des précédentes.
Nous sommes donc partis pour un nouvel épisode de gouvernement mondial par le mensonge et la télé. C’est plutôt pas de bol pour ceux qui rêvaient d’autre chose.
Michel Costadau
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