Je me suis posé une drôle de question sur la notion de prix : est-ce que toutes les choses valent le prix qu’on les paie. Oh pas du tout pour faire un numéro de plus d’une revue de défense des consommateurs, qui d’ailleurs défendent surtout la consommation. Non juste pour essayer de comprendre le mécanisme que joue le prix dans notre vie. Par exemple : est-ce que quand vous avez payé un kilo de sucre moins cher, vous avez fait des économies ? Certes la réponse n’est pas facile, parce que beaucoup de facteurs rentrent en jeu.
Mais en y réfléchissant, j’ai découvert que la place du prix dans nos existences est ahurissante.
Prix au mètre, moitié prix, canon, au kilo, à l’unité, de gros, d’ami, départ usine, ferme, avant remise, cassé, valses des prix, sans garantie, avant impôt, hors de prix, au litre, indécent, exorbitant, de départ, service compris, pas de prix, départ Rouen, premier prix, d’appel. Y en a que pour lui.
En plus pour la valeur absolue des prix, il n’y a pas vraiment de rationnel. Pour moi il n’y a strictement aucune raison que le pain vaille 1€ ou 10€ le kilo ou que la vie humaine vaille moins de 50€ au Brésil.
Mais relativement on peut se poser des questions.
Les économistes essaieront d’expliquer que la valeur, la rareté, l’offre font le prix. A vrai dire, ils peuvent dire ce qu’ils veulent, ça n’a aucune importance et surtout aucun rapport avec des connaissances ou des démonstrations scientifiques. L’économie est une activité humaine comme les sentiments et n’a donc rien d’une science.
Bien sûr certains calculs de prix reposent sur des méthodes et des paramètres et donnent lieu à des tas de logiciels. La rédaction d’un devis est d’ailleurs la pierre angulaire des artisans et des entreprises.
Et à la fin qu’est-ce qu’on a : un prix. Que l’on peut du coup comparer à d’autres prix souvent sans comprendre pourquoi ils peuvent être différents puisque en définitive il s’agit du même produit ou de la même réalisation.
Pour corser le tout, il y a beaucoup de choses gratuites qui ont un prix, par exemple l’eau, le pétrole ou le miel. Dans ces cas-là ça devrait être presque donné à l’utilisateur. Ce n’est hélas pas le cas et bien au contraire ce sont les producteurs et les compagnies qui font la loi. Aujourd’hui quand nous regardons quelque chose, nous nous intéressons d’abord à son prix.
Les restos sont hélas fermés, mais la première chose affichée c’est le prix du menu. Le prix est le premier marqueur de nos réflexions. Depuis 50 ans les usines à consommation nous roulent dans la farine avec une soi-disant bataille des prix. Mais la réalité est sans appel : ce qui est moins cher est de moins bonne qualité. Le prix est un très mauvais paramètre de décision. Mais il est facile à afficher et garde un caractère attractif.
Mon idée n’est pas de demander à tout le monde d’oublier les prix, même les riches et peut-être surtout les riches se font avoir. L’idée c’est, par exemple, de dire qu’il y en a marre de la baisse continue de la qualité pour continuer à entretenir un discours paternaliste sur le pouvoir d’achat.
L’idée aussi c’est de dire que le prix que nous payons pour le virus est insupportable. Mais le pouvoir a trouvé là une martingale qui gèle toute contestation et ça n’a pas de prix.
Michel Costadau
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