Je reste figé, il me semble que ma réparation de la palissade de ce matin est démolie. Je m’approche, effectivement les trois planches sont par terre avec les clous tordus qui dépassent. Ça ressemble à du vandalisme ce truc. Ou alors quelqu’un m’en veut pour quelque raison que je ne connais pas. Il me vient aussi une idée. Si une personne voulait voir chez moi et que cette partie de la palissade le gênait il aurait alors fait cette échancrure. C’est bien sûr peu probable mais je me mets au pied de la maison et je regarde ce que je vois par le trou de la palissade. Rien, je ne vois rien à part la façade de la maison d’en face, même en bougeant le long de mon mur. Ce n’était pas une bonne idée.
Je retourne voir Timor pour faire le menu de midi. Nous convenons qu’un bon steak avec des pommes sautées fera l’affaire. Je vais donc faire les courses en passant quand même sur le trottoir d’en face pour regarder ce que l’on voit de la maison à travers le trou de la palissade. On voit une fenêtre, celle de la cuisine ce qui me laisse perplexe.
Je me mets donc à penser en moi-même et tous les avatars de la période actuelle me sautent à nouveau à la figure, car une chose est sûre c’est que l’ambiance actuelle me sort par les cheveux comme autant de tentacules de l’hydre de Lerne. Il faut dire que j’avais un peu galéré au magasin pour trouver mon steak. Ce que j’aurais voulu était un peu cher pour la qualité que je voyais et ce qui était abordable ne me plaisait pas trop genre basses-côtes ou joues. Ah certes le poulet n’est pas cher, le porc encore moins mais ça n’a aucun goût. Pour être clair, en magasin, seul l’agneau a encore un peu de relief, tout le reste n’est que du bénéfice sur pieds. J’hésite entre hampe et bavette et j’opte quand même pour de la bavette hors de prix, qui me paraît pas trop mal coupée, en espérant qu’elle sera assez savoureuse.
Pendant le repas je demande à Timor s’il a des précisions sur son départ. Il me regarde de biais pour me dire qu’il verra ça cet aprèm, ce dont je me doutais et il repose ses couverts. Avec la main je détourne le couteau qu’il a posé dans son assiette et qui était dirigé vers moi. Je n’aime pas qu’un couteau soit pointé dans ma direction, surtout s’il est pointu. C’est une impression désagréable et je n’aimerais pas être à une table celui vers qui sont pointés tous les couteaux. C’est un très mauvais signe. Certes c’est un geste instinctif de poser fourchette et couteau soit en biais dans son assiette soit le long de celle-ci. Et souvent il y a quelqu’un en face ou de côté qui est dans la ligne de mire. Que l’on mange face à face ou sur des côtés contigus, le risque est grand d’avoir un couteau dirigé vers soi. Je suis assez vigilant là-dessus.
Je lui explique donc que demain soir j’allais partir à Grenoble et que je lui laissais l’appart sans problème. C’est dehors que nous prenons le café, sans que la discussion dépasse le stade de : est-ce qu’il y a du sucre, c’est chaud, on est bien. Rapidement Timor s’éclipse en me disant « à ce soir » et je vois qu’il est bien habillé, tiens tiens !
Michel Costadau
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