-Oui bien entendu, je ne vous ai d’ailleurs demandé aucune réponse pour le moment. Je dois vous préciser que, quel que soit le cas, il n’y aura aucun document papier, électronique, sonore ou holographique entre nous, tout est verbal,
-Bon je vous donne ma réponse demain matin et, au fait, comment puis-je vous joindre ?
-Vous ne pouvez pas, c’est trop compliqué, je vous appelle demain matin vers 9 h. Est-ce que ça vous va ?
-Ben, comme vous le présentez, j’ai pas trop le choix, ok on fait comme ça.
Maintenant il faut que je réfléchisse un peu pour prendre ma décision. Je sors pour passer chez Bulan et faire quelques courses.
C’est lui qui m’ouvre et je vois qu’il est en train de composer avec un piano, une guitare et un cahier. Je lui dis que je ne veux pas le déranger et je lui demande des nouvelles de sa mère. Elle va bien me dit-il, va lui dire bonjour. Je la trouve en train de lire dans son fauteuil. Elle pose son livre et me demande comment je vais, avec un grand sourire.
-Bien, très bien, je me suis juste un peu inquiété de ne trouver personne hier lorsque je suis passé, peut-être tout le monde était-il sorti,
-Oui nous avons été faire une promenade dans le parc car il faut que je marche et d’ailleurs ça ne va pas plus mal,
-La prochaine fois demandez-moi, je me ferai un plaisir de vous accompagner et nous pourrons discuter,
-C’est une bonne idée et je crois que vous aimez bien parler, moi aussi d’ailleurs,
-Il est vrai que je n’ai pas dit grand-chose parce que vous m’impressionnez un peu alors il me faut du temps pour mettre quelques idées en place,
-Oui je vois que vous avez des idées, me semble-t-il, mais méfiez-vous des idées ; je veux dire gardez-les pour vous le plus longtemps possible pour ne les sortir qu’une fois polies, comme des galets de rivière. Et cela, même si c’est dans une discussion, prenez votre temps, faites repréciser la question s’il y en a une. Souvent les discussions partent dans tous les sens car les répliques vont trop vite, rebondissent sur les derniers mots et perdent le fil d’origine. Or ces échanges sont un des moyens le plus sûr de progresser dans son jugement ou dans sa connaissance, mais souvent ça virevolte et ne fait qu’effleurer les choses, de la parlote quoi,
-Ah, vous avez raison, c’est un piège dans lequel je tombe régulièrement et dans certaines soirées, la boisson aidant, j’ai effectivement du mal à garder le cap. Cependant, j’essaie dans ces cas-là de m’en tenir à une seule notion et d’y revenir tout le temps. Ça fait un peu répétitif mais ça permet de progresser dans le débat s’il a lieu, car du coup mon attention et mes arguments restent ciblés,
-Oui je vous l’ai dit et maintenant je confirme que ce ne sont pas les idées qui vous manquent, mais, peut-être, la manière de les faire fructifier. Car le but n’est pas de convaincre qui que ce soit de ses croyances, il faut laisser ça aux propagandistes, aux religieux et autres missionnaires. L’objectif est d’enrichir son propre jugement, c’est le but de la discussion,
-Vous voulez dire qu’il ne faut pas chercher à avoir raison. Pourtant c’est bien dans ce but que je cherche à développer des arguments. Défendre mes convictions est le moteur même de mes échanges. Si tout le monde est d’accord il n’y a plus d’enjeu, et je ne vois pas comment il peut y avoir enrichissement d’idées si tous disent la même chose,
-Vous devez comprendre que l’on peut être asez d’accord, mais avec des arguments différents. En fait une de vos forces repose dans la faiblesse des arguments qui vous sont proposés ou opposés. C’est là où il faut puiser pour solidifier vos propres connaissances,
-Vous voulez dire qu’une discussion ne sert qu’à renforcer ses idées, mais ça on peut le faire en lisant, mais dites-moi avez-vous des nouvelles de Sazak ?
-Oui justement j’allais vous en parler, mais nous devons aussi reparler de la lecture,
Michel Costadau
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