Quant à caritatif, ce mot me fait plutôt hurler. Non pas que le dévouement des bénévoles soit contestable, pas du tout, bien au contraire. Mais on est dans le registre du curatif dont l’existence n’est dûe qu’à des situations de violences dont l’homme est presque toujours responsable. C’est une machine qui marche sur la tête : plus d’efforts sont faits pour soigner le mal que pour empêcher qu’il arrive. Il y a comme une fatalité acceptée que les violences sont inévitables, qu’elles font partie de la nature humaine. On reste dans le domaine de la croyance, sciemment entretenue par les politico-religieux qui nous dominent.
Certes la terre a des sursauts dévastateurs, mais il n’y a aucune raison d’en rajouter. La simple logique serait justement de tirer enseignement de notre commune nature pour limiter les dégâts. D’ailleurs c’est ce que font toutes les espèces vivantes sauf nous. Les animaux se soignent c’est vrai mais surtout ils évitent de se blesser mortellement. D’une manière plus générale ce sont le ONG qui me sortent pas les oreilles. Car chaque ONG est la manifestation d’une carence de la société. Et plutôt que d’y remédier, le pouvoir, grâce à çà, préfère laisser des capitaux privés acquérir du pouvoir en particulier médiatique sans que ce soit des contre-pouvoirs puisqu’ils ne représentent rien. Du vent.
Bercé par ces pensées divergentes, je somnole une bonne partie de l’après midi. Je sors faire trois courses pour ce soir, puisque Timor doit revenir et, comme je le suppose, avec Sazak. C’est marrant parce que malgré la gestion calamiteuse du virus, les magasins restent un lieu de rencontre voire de rendez-vous. Bien sûr pas autant que les marchés de plein vent, auxquels ils ont pourtant essayer de porter un coup, mais quand même. Enfin surtout les discounts et les Inter, c’est un peu moins vrai pour les U et les Carrefour parce qu’ils ont une clientèle moins locale je veux dire d’origine moins locale.
Comme prévu, Timor se pointe avec Sazak pour l’apéritif et me raconte ses travaux du jour dont il reste encore quelques traces blanches sur leurs mains et avant-bras. Il faut qu’ils y retournent demain pour finir. Je n’ai toujours pas résolu le problème de savoir si je préfère discuter avec Timor seul ou si je peux en parler avec eux deux. Compte tenu de l’opportunité, je me décide, après avoir rempli les verres, à lancer le sujet :
-Dis moi Timor, t’es un peu au courant pour le mari de Vienna ?
-Ah oui, Sazak m’a dit qu’ils étaient séparés, mais en mauvais termes,
-Euh c’est un euphémisme, je crois plutôt qu’il leur a déclaré la guerre,
-Ah oui c’est possible, mais d’après ce que je comprends Sazak n’est pas très inquiète,
-Ça c’est possible, Sazak est assez solide et n’en parle pas mais il y a les autres qui eux ont plus d’anxiété. Est-ce que Sazak t’a dit qu’il a l’intention de revenir dans le coin ces jours-ci ?
-Non, elle ne m’a pas parlé de lui. Tu sais nous n’avons pas beaucoup le temps de parler de ça. On s’entend bien mais on fait surtout connaissance et je la découvre petit à petit. Moi j’ai envie que ça dure alors je vais doucement,
-Oui c’est vrai c’est ton tempérament. Mais nous avons décidé de nous protéger en nous prévenant les uns les autres si nous voyons quelque chose. Es-tu d’accord avec ça ?
-Ah pas de problème, mais comme je ne l’ai jamais vu alors j’aurai du mal à le reconnaître,
-Il ne s’agit pas forcément de le voir, il peut s’agir de n’importe quoi qui attire ton attention. Alors tu préviens Sazak et réciproquement. Et c’est Bulan qui fait la tour de contrôle en centralisant toutes les infos. Et en nous donnant des consignes en cas de besoin. Sans tomber dans le parano, si toi tu ne le connais pas, lui il te connaît, c’est ça l’idée. Il entretient une pression psychologique sur cette famille par des moyens assez retors en agissant sur chacun d’une manière indépendante. Notre but est donc de ne laisser aucun d’entre nous sous sa seule emprise, en nous alertant mutuellement à la moindre menace,
Michel Costadau
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