Constatons d’abord que les attaques contre les champs ont maintenant atteint un stade limite.
Pour commencer l’urbanisation et ses corolaires routiers, industriels et commerciaux ne datent pas d’aujourd’hui mais n’ont pas l’air de vouloir ralentir.
A cela s’ajoute depuis quelques années le détournement de la terre vers des productions énergétiques. Les hectares de colza à destination des agro-carburants, les hectares de maïs à destination des méthaniseurs ou les hectares de bois à destination du chauffage ou de sapins de noël se multiplient. Et grave perversion ces cultures sont éligibles à la PAC, c‘est à dire qu’elles ponctionnent les budgets consacrés aux cultures alimentaires.
Et maintenant arrivent les champs de panneaux pour produire de l’électricité. Avec toujours cette incitation financière voulue et entretenue par l’Etat. Ces subventions ont pour but de rendre ces pratiques attractives et rentables, du moins sur le papier. Avec en plus la promesse d’une quasi absence de risques.
Disons qu’il existe plusieurs types de solutions photovoltaïques allant de la couverture intégrale interdisant la moindre culture jusqu’à des cohabitations panneaux-cultures plus ou moins intégrées.
L’agriculteur se trouve alors confronté à une équation simple : soit il continue avec une rentabilité de l’ordre de quelques centaines d’euros à l’hectare, soit il donne son champs à une société qui installe des panneaux avec une rentabilité de l’ordre de quelques milliers d’euros à l’hectare. La différence c’est que dans le premier cas il est libre de faire ce qu’il veut chez lui et dans le second cas il est aux mains d’une entreprise et d’un gouvernement lui-même au service des entreprises. Mais avec de l’argent à la clé.
Alors que va faire l’agriculteur ? L’agriculteur qui, vous l’avez compris, utilise la terre seulement pour gagner de l’argent va « saisir cette opportunité » comme disent les technocrates. Il va donc, complètement oublier le volet alimentation humaine de son activité pour plonger dans le tout électrique. Ce qui va en plus lui donner d’autres moyens pour encore s’agrandir. En plus les méthaniers bénéficient encore des aides de la PAC, mais normalement les électriciens n’y auront pas droit bien que ca se discute.
Le paysan lui va réfléchir. Certes il est tenté, car ça mettrait un peu de beurre dans les épinards et il pourrait toujours faire paitre quelques bêtes dessous, car il y a le problème de l’entretien du sol pour éviter que poussent des arbres ou des ronces capables de passer par-dessus les panneaux. Oui mais aussi cette terre il ne pourra plus la cultiver, voir pousser ce qu’il a semé, choisir sa rotation ou ses essais. Ca le désole et en général il renonce à ces offres alléchantes. Bien sûr certains succombent quand même quand ils sont coincés et ne savent plus trop comment s’en sortir parce qu’ils sont petits, non prioritaires, invisibles.
C’est le moment de se rappeler que nous vivons dans LA société de la consommation. Consommation de biens et de services à ne plus savoir qu’en faire. Mais aussi consommation de matières premières classiques charbon, fer, pétrole puis titane, lithium et tous les métaux rares. Et, aussi, déjà depuis longtemps mais avec une prise de conscience récente eau, air et terre.
La consommation de l’eau s’apparente un peu à un cycle. Tout le monde peut voir que l’eau utilisée pour l’industrie, l’agriculture ou la vie humaine retourne dans le sol et même non retraitée réalimente au moins en grande partie la mer et donc la pluie, Ca donne un peu l’impression que l’eau c’est éternel et qu’elle ne manquera jamais. C’est évidemment un ressenti faux puisque l’eau manque déjà dans beaucoup d’endroits. Et que dans d’autres elle provoque inondations et submersions. Sans parler des combinaisons que peut rencontrer l’eau avec divers oxydes, en bien faible quantité certes.
Par contre pour l’air le ressenti est plus complexe, car l’air peut être plus ou moins pollué, voire irrespirable. L’expérience de la montagne permet aussi de comprendre que l’on peut manquer d’air, en l’occurrence d’oxygène. Cependant il est clair que l’air brule, c’est dire que de l’oxygène disparait pour former ce fameux gaz carbonique emblème mortel de la société de consommation. Mais là encore comme pour l’eau l’air donne une impression d’inépuisabilité, puisque sa disparition est invisible. Ce n’est pas le cas de la terre.
Michel Costadau
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