Tant que nous leur laissons le champ libre évidemment. Remarquez « nous », c’est un peu difficile de dire qui c’est. En fait ça veut dire qu’il n’existe aucun contre pouvoir dans notre pays. Et donc « nous » c’est vraiment nous tous qui sommes les jouets du couvercle médiatique qui pèse sur nos têtes.
Un contre pouvoir c’est une partie institutionnelle de la société qui arrive à s’opposer à l’exécutif. Exemple typique : la presse. La liberté de la presse est écrite dans les institutions. Cela lui permet, en théorie, de dire ce qu’elle pense des mesures gouvernementales. Je dis en théorie car la presse libre a déjà perdu la bataille de la médiatisation. 99% de l’audience est détenue par des supports aux mains de la finance. Le reste a une toute petite audience sans moyens. On peut donc dire que la presse est libre mais elle n’a aucune envie d’utiliser cette liberté car elle est inféodée au pouvoir. Il se confirme que ça fait longtemps qu’il n’y a plus de contre pouvoir chez nous. Le récent exemple des rafales de 49.3 en est une claire démonstration. Alors sans presse libre, sans opposition parlementaire, avec une infiltration des lobbies dans les moindres rouages de l’administration, où est le contre pouvoir.
Peut être voulez vous me dire qu’il y a les réseaux sociaux. Certes oui ça existe mais face book c’est Zuckenberg, twitter c’est Trump et instagram et whatapps c’est Meta. Il s’y échange surement des propos captivants mais ça reste aux mains de la finance. Et ça ne m’inspire qu’une confiance relative dans le pouvoir que ça a sur l’opinion. Ces réseaux ont du pouvoir sur les gens, utilisateurs ou pas, mais il n’y a aucun encouragement à permettre aux gens de penser, bien au contraire.
Car il y a au moins deux manières de produire l’info : soit comme un clé en main indiquant ce qu’il faut penser de telle ou telle chose, soit comme un compte rendu plus ou moins détaillé d’une séquence de réalité.
La première manière est utilisée par presque toutes les chaines de télévision, les journaux nationaux, la presse quotidienne régionale ainsi que par les hebdomadaires et leurs doubles numériques. La pratique est assez simple. Il s’agit de tout transformer en faits divers.
D’abord il faut forcer sur le registre qui fait peur : vol, guerre, maladie, extorsion, accident, violence, assassinat. Ensuite il faut décrire les victimes comme pouvant être vous : une personne âgée, un petit commerçant, quelqu’un dans la rue ou se garant dans un parking, ça c’est excellent. Ou quelqu’un qui fait des ménages, bien sûr l’employé de banque ou la jeune intérimaire, la mère de famille est un top.
Enfin il faut suggérer et non décrire. Deux hommes maqués ont pénétré chez Mme A pendant qu’elle regardait la tv. C’est la voisine qui a vu ces hommes et heureusement car Mme A ne s’est rendu compte de rien. Interrogée, la voisine n’a pu décrire les agresseurs –d’homme entre-aperçu on passe à agresseur– car il faisait presque nuit. L’enquête suit son cours.
La deuxième manière est classée le plus souvent dans le complotisme car la réalité, qui est surtout une photo, a ceci de redoutable c’est qu’elle montre les gens au lieu de les évoquer. Ainsi mettre un élu en face de ses contradictions verbales par une succession d’enregistrements ressort, pour lui, de la diffamation et l’action est assez vite disqualifiée par les médias dominants. Il reste donc le registre de la pensée ce qui a l’avantage de ne faire de mal à personne, mais est assez dur à avaler pour la majorité de la population dont la capacité de concentration est ajustée à un match de rugby mais ne peut aller jusqu’ à un match de base-ball.
En combinant cela on arrive assez vite à ce que l’info pure ne soit pas très accrocheuse et que les gens préfèrent être alimentés de nouvelles prémâchées. N’oublions pas que contrairement à moi et à quelques autres courageux, les gens cherchent surtout à penser comme tout le monde et non à avoir leurs propres idées. Or rien de tel que la tv et les journaux pour diffuser ce que tout le monde pense. Il n’y a qu’à écouter, c’est plus facile que de penser.
Michel Costadau
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