Vous le savez, il est très important d’être en accord avec soi-même. Quitte à être en désaccord avec d’autres, voire avec beaucoup d‘autres. Enfin pas avec tout le monde quand même, parce que ça peut cacher un problème de personnalité ou de misanthropie.
Bon voilà, là je ne suis pas d’accord avec la Cour européenne de justice la CJUE.
La question qui lui était posée par la Commission européenne concernait une loi hongroise demandant de faire apparaître, à partir d’un certain montant, les noms des donateurs et sponsors étrangers des ONG agissant dans le pays.
Cette loi a rapidement été étiquetée anti-ONG par la Commission européenne et était décrite comme le pendant de la loi contre les agents de l’étranger adoptée en Russie en 2012. En fait la loi hongroise avait un objectif général sur la transparence du financement associatif. Elle avait aussi pour objectif d’éviter que certaines ONG fassent passer leur intérêt particulier avant l’intérêt général de la Hongrie. Elle avait aussi, au dire de la commission, une cible non nommée en la personne du milliardaire américano hongrois Soros, qui intervient abondement en Hongrie au travers de sa fondation Open Society.
Bref la Commission a entamée une procédure d‘infraction contre la Hongrie. Amenée à se prononcer, la CJUE a donné raison à la Commission avec comme premier motif « cette loi est de nature à entraver la liberté de circulation des capitaux », en rappelant que la libre circulation des capitaux est un principe fondamental de l’UE. Vlan ! Inattendu mais on ne peut plus clair.
A priori cette loi n’empêchait aucunement la circulation des capitaux mais certaines ONG ont indiqué que « beaucoup de nos donateurs étaient inquiets que leur nom puisse être un jour rendu public et pris pour cible ». On aurait plutôt cru que les donateurs auraient été fiers que l’on connaisse leur nom et qu’on les cite pour les actions menées, mais non c’est le contraire.
La suite de l’attendu de la CJUE est tout aussi surprenant : « les juges estiment qu’« une législation qui se fonde sur une présomption de principe et indifférenciée selon laquelle toute aide financière versée par une personne physique ou morale établie dans un autre Etat membre ou dans un pays tiers … sont, en elles-mêmes, susceptibles de mettre en péril les intérêts politiques et économiques » de cet Etat ». La boucle est bouclée. Les ONG n’ont pas besoin d’être transparentes et ne font que du bien.
Et justement moi j’aimerais bien savoir qui finance Greenpeace, Amnesty, Attac, Acted et autres SOS quelque chose. L’idée générale c’est que c’est pour de bonnes causes, certes : alimentation, santé, éducation mais quand même il y a un biais parce que, au final, les ONG réussissent seulement à rendre le libéralisme plus supportable. Je crois même que c’est leur fonction principale, un peu comme la Croix-Rouge permet des échanges de prisonniers plutôt que leur exécution. La Croix-Rouge ne rend pas la guerre propre mais elle permet de croire qu’il y a des règles.
Même si je n’aime pas les ONG, je ne leur reproche pas de faire des choses illicites, non, mais quand même pour moi elles font partie de la communication libérale. Elles en sont même un rouage essentiel. Une espèce de recours vertueux financé par le système lui-même.
Et c’est pour ça qu’on ne connaît pas les donateurs.
Michel Costadau
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