Pour alimenter notre réflexion nous avons, aussi, sous les yeux le spectacle que nous joue la classe politique espagnole. Les électeurs ont voté et il se trouve qu’aucun parti n’a eu la majorité. C’est assez normal, ça représente les diverses sensibilités des Espagnols et il est rassurant qu’ils ne soient pas tous du même bord. Seulement la classe politique n’aime pas la diversité ni la différence. Il lui faut qu’un seul parti ait tout le pouvoir, il n’y a que comme ça que l’on peut faire du vrai copinage et ignorer les électeurs.
Alors la classe politique a dit : les électeurs n’ont pas compris, ils sont bêtes comme leurs pieds, il faut les faire revoter pour qu’ils désignent le parti qui doit gouverner tout seul. Et ils organisent, car ils font ce qu’ils veulent, une deuxième élection et les Espagnols, qui ne sont pas bêtes du tout, ont confirmé leurs opinions et réparti leurs voix entre les mêmes partis.
Fichtre, la classe politique n’est pas du tout contente. Milledieux les électeurs ne jouent pas le jeu. Il faut qu’ils se mettent d’accord sur un seul parti. Nous, la classe politique, allons être obligés d’organiser une troisième élection. STOP. STOP.
S’il y a quelqu’un qui n’a rien compris c’est bien la classe politique espagnole. Ce que demandent les électeurs c’est que ceux qu’ils ont élus gouvernent. Pourquoi faudrait-il avoir la majorité pour gouverner, ça sort d’où ? C’est une idée complètement macho ce truc. Il va falloir que la classe politique réapprenne le vivre ensemble. Dans la population, il y a diverses tendances et diverses situations et beaucoup d’opinions. Et les gens se débrouillent assez bien avec ça. Ca s’appelle vivre ensemble.
Mais la classe politique ne sait pas vivre ensemble, c’est-à-dire discuter, écouter, hiérarchiser les problèmes, faire des compromis, faire des étapes, travailler ensemble quoi. Et les méthodes pour travailler ensemble existent. Les entreprises fonctionnent comme ça. Par exemple, le service technique dit qu’il prévoit un trou pour faire passer un câble ; le service peinture souhaite qu’il soit plus petit et les électriciens plus grand ; les mécaniciens disent qu’on pourrait faire deux trous plus petits si nécessaire ; les commerciaux disent que le client ne mettra pas un sou de plus, et les gestionnaires disent qu’il faut choisir avant telle date pour ne pas retarder le programme. Et la décision prise n’est pas un pis-aller, c’est la meilleure solution dans le contexte donné. Pourquoi les politiques ne sauraient-ils pas faire ça : prendre ensemble la meilleure décision.
Pourquoi ? Parce que le moteur de la classe politique n’est pas du tout le bien public, ni même le mieux public. Non, son moteur c’est le pouvoir personnel, les réseaux de copains, l’arrivisme et la suffisance. Evidemment, personne ne pourrait plus dire « la loi untel », parce qu’elle serait l’œuvre de tous. Personne ne pourrait plus dire le président untel a décidé d’augmenter tel barème, parce que ce serait l’œuvre de tous. Clairement, la classe politique ne cherche pas à résoudre le moindre problème et en Espagne le chômage est à plus de 20 %. Non, elle est exclusivement tournée sur elle-même. Elle ne s’intéresse pas du tout aux opinions de ceux qui les ont élus, mais uniquement à l’entre-soi, à ses avantages et à son confort. Alors stop.
Michel Costadau
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