C’est un billet un peu spécial puisqu’on mélange économie et philosophie. Economie pour proposer une approche simple et concrète de la décroissance. Philosophie pour mettre en perspective notre genre de vie et notre consommation. L’idée de base dont je veux parler est la durée de vie. Pas seulement la nôtre, mais surtout celle des produits auxquels nous sommes habitués. Habitués est peut être un grand mot puisque justement les produits se renouvellent et même de plus en plus vite. De l’aveu même de leurs concepteurs, les produits ont une obsolescence programmée. Bigre. Ca veut dire, concrètement qu’ils sont faits pour ne pas durer longtemps. C’est un sérieux problème.
Notons d’abord que les concepts de désindustrialisation ou de décroissance ont une connotation négative puisqu’il s’agit de diminution, de réduction, ce qui n’est pas très porteur. Alors qu’augmenter la durée de vie donne l’impression de gagner quelque chose, ce qui est plus satisfaisant. Si l’on se fixait, par exemple, de doubler la durée de vie des chaussures en cinq ans, pour la porter de deux ans à quatre ans, on aurait à la fois diminué la consommation et probablement en même temps gagné en qualité. Dans le domaine automobile, les voitures de 2018, 2020, 2022, 2024 sont déjà dans les tuyaux. Si, par exemple, on pouvait commercialiser seulement en 2022 les voitures de 2018 et 2020, on gagnerait quelques années de durée de vie des produits. Bon cela est évidemment un peu rapide et simplificateur.
Mais le concept est là : augmenter la durée de vie c’est-à-dire d’utilisation des produits de grande consommation, serait sûrement un pas vers la décroissance.
Seulement, sommes-nous prêts à cela ? Clairement notre genre de vie est accro à la consommation. La consommation c’est le ferment et le pilier de l’économie productiviste. Du coup, tous les moyens sont bons pour l’entretenir et la développer. Certains moyens sont directs comme la mode qui permet de renouveler rapidement les produits, la publicité qui incite à acheter l’inutile ou la technologie qui « invente » de nouvelles fonctionnalités. Certains sont indirects comme les soldes, les aides fiscales, ou les normes. Certains aussi sont pernicieux comme le bio, la pureté de l’air, le réchauffement climatique ou le tourisme. D’autres encore sont psychologiques comme la santé, eh oui se soigner c’est souvent consommer, ou les réseaux sociaux. Notons que, d’une manière générale, l’écologie est devenue un des grands pourvoyeurs de la croissance productiviste. Comment abandonner tout ça ? Il semble que nous ne soyons pas prêts à grand chose dans ce domaine. Le cogito est devenu « je consomme donc j’existe ».
Bien sûr, il paraît possible de vivre sans trop consommer, mais c’est difficile et on devient vite marginal. De plus, nous, les grands consommateurs des pays riches, avons tendance à voir d’un mauvais œil tous ceux qui accèdent juste à la consommation. Alors substituer à la croissance du PIB celle de la durée de vie des produits n’est pas encore à l’ordre du jour. Dommage.
Mais est il possible, au moins, d’amorcer la pompe. Ben justement y un truc auquel je pense, c’est la télé. La télé, c’est exactement le mélange de la pub et de l’information. Arrêter la télé c’est comme arrêter de fumer, tout le monde en est capable mais personne ne le fait. Alors rejoignez le club des non-télé. Nous sommes déjà 1,4 % y a de la place.
Michel Costadau
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