Le couple n’est que le rapprochement momentané de deux individus de sexe différent pour des besoins de procréation ou, pour certaines personnes du même sexe, pour combler la solitude. Le couple est basé sur l’attirance et le partage. Le fait que l’élevage des enfants soit, aujourd’hui, assuré par les couples est une déviation sociétale crée par la destruction organisée de la famille dans la société de consommation. L’éducation des enfants est clairement du ressort de la famille, les jeunes couples étant d’une ignorance complète sur le sujet. Les couples sont certainement et sans ambiguïté responsables de leurs enfants, mais ils n’en sont pas propriétaires. D’ailleurs aucun individu n’est la propriété de qui que ce soit. C’est vrai depuis l’abolition de l’esclavage, bien que le salariat ait remis en cause cette abolition. Cependant les enfants appartiennent surtout à une famille, bien avant d’appartenir à une société. Depuis toujours les hommes vivent au moins deux générations, la première pour eux et la deuxième pour leurs petits enfants. Ceci ne veut pas dire que les couples doivent se séparer quand ils ont eu des enfants, non, ils peuvent rester ensemble d’abord pour combattre la solitude et aussi pour continuer à satisfaire leurs besoins sexuels, surtout pour les hommes. Il peut même advenir avec le temps une certaine affection qui rend la coexistence plus facile. Par contre, c’est à ce moment là qu’ils ont une bonne plus value pour l’éducation. Cette plus value vient d’une part d’une expérimentation directe, même si elle a été beaucoup aidée par la famille et d’autre part de la maturité acquise avec le vécu à condition de s’être un peu remué dans son parcours. Disons que le fils unique qui succède à ses parents dans une même fonction sociale et qui a épousé la fille d’un voisin, va manquer un peu de matière pour se faire une idée sur les choses de la vie. La vie doit s’apprendre avant d’être enseignée et il en est de même de tous savoirs. Bien sûr il paraît plus facile de faire un programme pour dire ce qui doit être transmis et de trouver des exécutants pour enseigner ce programme, mais la transmission reste faible tant qu’elle n’est pas étayée par sa propre expérience. D’ailleurs, dans les sciences par exemple, les théories qui ne ressortent pas de l’expérience relèvent alors de la croyance et doivent être considérées seulement comme telles. Et donc….
-Écoute maman, tu es sûre que tu ne t’égares pas un peu, dit Taqui,
-Bon, alors vous êtes un peu perdus, il me faut recentrer mon propos. Je suis passé des enfants à la famille, de la famille à l’éducation et de l’éducation à la science. Je voudrais encore dire un mot sur la famille. J’ai d’abord évoqué son côté concentrationnaire mais aussi son caractère de structuration de base d’une société. Certes c’est contradictoire mais, clairement, les deux co-existent. Leurs contraires aussi, puisqu’elle peut être source inépuisable de réconfort, aussi bien que se déliter lentement jusqu’à disparaître et s’évanouir sans bruit. D’une certaine manière, la famille est le cordon qui nous relie de proche en proche à une racine commune. Il y a beaucoup d’hommes sur terre et l’on voudrait qu’ils soient tous frères. C’est une gageure intenable qui est démentie tous les jours, car les hommes ne sont pas des frères mais des ennemis. La seule chose qui les relie c’est l’ascendance. Les hommes ne sont pas frères mais fils, là est le lien. Ce qui crée l’humanité ce n’est pas l’égalité ou la fraternité c’est la descendance. Nous avons tous les mêmes ancêtres auxquels certains rendent ou non un culte particulier. Je ne dis pas le même ancêtre, une seul homo unique, surtout pas. C’est symptomatique de la pensée hégémonique dans laquelle nous vivons. Non, je dis divers ancêtres apparus presqu’au même moment, dont certains ont disparu et d’autres se sont croisés.
Je me permets alors d’intervenir :
-Je suis assez d’accord avec cette idée. Nous sommes plutôt dans l’immédiateté et même dans la fuite en avant. Tout le monde parle d’avenir pour oublier le présent et surtout le passé,
-Vous voulez dire, reprend la mère de Bulan, que magnifier l’avenir est un leurre qui nous évite de fouiller le passé,
Michel Costadau
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