Timor revient avec de bonnes nouvelles. Vienna a bel et bien entendu du bruit autour de la maison, mais elle n’a surtout pas cherché à savoir ce que c’était, ni à ouvrir et est restée silencieuse sans faire le moindre déplacement. Il semble que ce ne soit qu’ensuite qu’il soit venu chez moi. Mais ça veut quand même dire qu’il avait préparé le coup de la palissade, car chez Bulan il n’y en a pas.
Nous convenons que la réunion stratégique aura lieu demain matin chez Bulan vers 10h. Il est largement temps d’aller se coucher, ce que tout le monde fait avec plaisir, y compris Timor qui retourne chez Bulan, et nous savons pourquoi.
J’ai quand même du mal à m’endormir à cause des têtes que j’ai vues au-dessus de la palissade. Pourquoi 3 ? Certes il y a les trois enfants de Vienna, mais ça ferait 4 avec elle. Vienna et moi ça ne fait que 2, de même que Bulan et moi. Alors il y a 3 femmes : Vienna et ses deux filles. Je tourne ça en boucle dans ma tête et je finis par m’endormir.
***
Au réveil j’ai un petit moment de confusion pour savoir qui dort encore à la maison, mais au final je suis tout seul, car tous les amis, compte tenu de la fête écourtée, sont sagement rentrés chez eux.
En buvant mon café je me prépare pour notre réunion. Pour le moment, c’est la guerre contre un ennemi invisible, ce qui éveille en moi tous les échos du volet moderne de la guerre c’est-à-dire la résistance. C’est vrai que, dans les guerres traditionnelles, l’ennemi est l’envahisseur et de l’envahisseur à l’agresseur il n’y a qu’un pas. Mais dans la guerre moderne c’est plutôt l’agresseur qui est invisible et intouchable, comme le net, l’info et l’argent. Dans ce contexte, celui qui ne veut pas s’appelle soit un traitre, soit un résistant. Nous sommes donc en situation de guerre moderne. Reste à savoir quel parti nous pourrons tirer de cette analyse.
J’arrive chez Bulan et tout le monde est là y compris deux des copains qui ont accepté de se joindre à nous. Nous sommes donc huit à prendre un café presque matinal c’est-à-dire pas trop corsé. C’est Vienna qui lance la discussion.
-Même si mon ex est vraiment quelqu’un d’impossible et de dangereux, je ne suis pas complètement étrangère à la situation actuelle. J’ai trop longtemps pactisé et pris sur moi. Cependant ce que j’aurai pu faire d’autre n’est pas évident. C’est pour cela que je ne développe aucune culpabilité, seulement une explication de la lente progression de cette exacerbation de la violence. Cette violence est clairement d’abord à mon égard,
-C’est tout à fait vrai, dis-je, Il me semble que vos enfants sont un peu moins concernés, ou plutôt moins visés. Par contre, par la création d’une certaine connivence avec vous, je me suis placé dans l’œil du dragon, alors que je ne cherchais qu’à vous aider à faire des promenades,
-Et je vous en remercie encore, car cela m’a servi de déclencheur psychologique. Maintenant j’aimerais que nous ne cherchions plus uniquement à nous défendre mais aussi à attaquer.
Bulan se manifeste alors :
-Mais comment maman? Nous ne savons absolument pas où il est. Ce n’est pas une cible mouvante, c’est une absence de cible. Je ne vois pas du tout ce qu’il est possible de faire,
-Eh bien on peut quand même, tenter quelque chose, répond Vienna. Nous n’allons plus attendre qu‘il se manifeste selon son propre vouloir, nous allons lui offrir l’occasion de venir, une occasion dont il rêve,
-Comme une espèce de piège, demande Bulan,
-Non, plutôt une comme une attraction qu’il aura envie de voir,
-A quoi pensez-vous ? répond-il,
-A une brocante, ou plutôt un vide-maison que nous pourrions organiser avec les voisins,
-Et vous croyez qu’il aurait envie de voir ça ?
-Oui parce que c’est la possibilité de pénétrer dans les maisons en toute tranquillité,
-Tranquillité ? Vous au moins, vous allez le reconnaitre, il va prendre ce risque ?
-D’abord il sait se montrer très discret, ensuite ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu, enfin ça fait surement partie de sa stratégie que je le voie à un moment. Ou que je devine que c’est lui,
Michel Costadau
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