Suite à la manifestation du 8 juin, il y a un début de libération de la parole et je me permets de mettre par écrit mon ressenti personnel et à chaud sur notre combat contre l’A69.
En gros j’ai le sentiment que nous faisons fausse route en nous abusant de mots,
Ceux qui disent que notre mouvement est populaire ou que l’opinion est avec nous nous mentent car ceux qui se sont mobilisés le 8 juin sont essentiellement des militants déjà convaincus et non la population en particulier celle du parcours prévus pour l’infrastructure.
Ceux qui disent que notre mouvement est pacifiste et non violent nous mentent car jeter des cocktails sur des fourgons de CRS, tirer avec des arbalètes sur des hélicoptères, refouler des journalistes ou bruler des récoltes sont tout simplement des agressions.
Ceux qui disent qu’ils reviendront autant de fois qu’il le faut pour manifester leur détermination et obtenir l’arrêt du projet nous mentent car la logique des affrontements ne sert que la cause du pouvoir et chaque explosion de grenade pousse la population dans les bras de la droite et donc des pros.
Par contre ceux qui disent que notre combat est sur le terrain politique, au sens de l’opinion et non des partis, nous mettent sur la voie d’obtenir quelque chose, voire même de gagner.
Seulement ce combat politique repose sur une logique à trois temps : opinion/élus/justice. C’est-à-dire que pour gagner devant la justice il faut que la classe politique commence à tenir compte de l’opinion de la population.
Or pour le moment nous avons perdu nos liens avec la population. Seuls les mouvements « sans bitume » ont encore des contacts, et organiser des réunions publiques devient de plus en plus délicat.
Fut un temps il était question de « comités locaux », de campagnes d’affichages, de tables rondes, de rencontre avec des intellectuels et même avec des élus. Tout cela est tombé à l’eau et il semble que la violence soit le seul moyen d’expression qui nous reste ou auquel nous sommes acculés.
Alors il est clair que les réactions que j’ai pu voir par rapport au comportement des certains masqués pendant et après la manifestation peuvent être le déclencheur d’une réflexion sur notre stratégie.
Au cours de discussions et un peu comme une excuse j’ai entendu affirmer que maintenant le mouvement contre l’A69 nous dépassait, nous échappait et que nous n’en avions plus le contrôle. Alors que le combat contre cette autoroute soit connu nationalement et même internationalement c’est une très bonne chose, mais il me parait difficile de se battre pour des personnes qui ne nous soutiennent pas. Certes nous nous battons pour nous, c’est l’adn de LVEL, mais aussi contre le saccage d’un territoire. Or si la population de ce territoire ne nous soutient pas nous devenons des illuminés qu’il ne faut plus écouter.
C’est ce qui est en train d’arriver. Car, à l’exception du cortège paysan, Roue Libre a plus ressemblé à une thérapie à grande échelle pour excités qu’à une démonstration de force pour la cause environnementale,
Bien sûr il est encore possible de stopper ce projet mais, après le 8 juin, un point d’étape me parait nécessaire. Continuer, comme si de rien n’était vers un acte4 à l’automne me parait suicidaire. C’est pour cela que j’écris ces trois mots et aussi pour encourager ceux qui souhaitent s’exprimer à le faire,
C’est exactement le moment.
Michel Costadau
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