Bon voila, la nuit on dort, c’est le principe, mais pas d’une traite. Il y a donc des moments d’éveil consacrés soit à la lecture, soir à un petit grignotage destiné à réenclencher le sommeil. Et donc lors d’une de ces périodes de lecture, j’aperçois un mille-pattes au plafond au dessus de notre lit. Edith n’aime pas tellement ces bestioles qui cependant se trouvent plus généralement sur le sol qu’au plafond. D’où ma double surprise.
Et une grosse réflexion. Ne rien faire pourrait conduire à ce que ce rampant se retrouve dans nos draps avec quelques piqûres à la clé, car ces spécimens sont réputés assez venimeux. Mais faire quelque chose ça consiste en quoi : lui demander de déguerpir, le réveiller pour qu’il se rue sur nous ?
Néanmoins, sans le moindre atermoiement je décide de passer à l’attaque. Je me saisis donc de la tapette qui ne quitte pas le petit coin d’étagère où je range les livres que je lis, n’ayant ainsi qu’à poser le livre qui m’est tombé sur le nez deux ou trois fois et du même geste éteindre la lumière pour regagner l’endormissement souhaité.
Muni de mon arme je me mets donc debout sur le lit, doucement pour ne pas la réveiller, et je cherche à me mettre dans la position la plus favorable pour pouvoir en un coup écraser l’envahisseur au plafond. Le geste n’est pas simple, il s’apparente assez au revers des pongistes et de ceux qui jouent sur la table.
Une fois dans bonne position, je frappe, schlamg. Le coup a été assez efficace et un résidu tombe assez bruyamment sur l’oreiller juste à côté de la tête d’Edith qui heureusement dort encore. Alerte générale mais en douceur car ce n’est pas le moment de flancher et d’un geste du bout de la tapette je projette le résidu sur le plancher afin de débarrasser le lit de cet encombrant dont je ne suis pas encore certain du décès. D’ailleurs je le cherche par terre, dans la ruelle comme dirait Molière, mais je ne le trouve pas. Je n’insiste pas énormément, l’instant n’étant pas propice au déplacement de meuble, d’autant plus que le lit ayant une roulette bloquée est assez délicat à remuer. Ca me rappelle d’ailleurs qu’Edith m’a demandé où était la roulette de rechange, mais évidemment je ne me souviens absolument pas où elle peut être.
Néanmoins je me recouche et reprends le livre que j’avais posé avant de partir à la chasse. Et je remets la tapette à sa place, prête à de nouveaux services. Car il n’y a pas que les scolopendres dans notre vie nocturne mais aussi les moustiques et les mouches. Les moustiques sont rares, d’autant plus qu’ils n’attaquent qu’Edith ce qui fait que pour moi c’est comme s’il n’y en avait pas. Mais la mouche est plus embêtante. Je dis bien la mouche, car il n’y en a qu’une à la fois et la supprimer résoudrait donc le problème. Seulement il y a de la perversité chez cet animal, car elle se met toujours dans des endroits impossibles, par exemple sur le nez. Dans ces conditions utiliser la tapette est difficile car outre que l’on ne voit rien, il y a une certaine retenue dans la frappe qui laisse toutes ses chances à l’insecte. Heureusement il lui arrive de se poser sur le mur où il est plus facile avec un geste bien calculé de l’écraser.
Bien sûr le reste du temps on dort.
Michel Costadau
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